dimanche 29 octobre 2017

Redonner vie aux torpilles Minitrix....






Cela faisait un bail que je n'avais plus fait rouler mon FO , c'est-à-dire mon convoi
de fonte en fusion.
Il se compose  d'une locomotive diesel  de la série  51 , avec , au crochet, deux
wagons-torpilles Minitrix encadrés de six wagons tombereaux.

Au démarrage ..., enfin.... , il n'y a pas eu de démarrage ... : le convoi est demeuré
obstinément immobile derrière la 51 occupée patiner désespérément ...

L'examen du châssis de la première torpille a révélé une déformation accompagnée
de bris du  support d'essieux d'un des bogies.

La matière dont sont constituées ces pièces est une sorte de zamac dont la fragilité
est extrême , comme je pourrai le constater lors du démontage des pièces demeurées
apparement intactes : elles tombent littéralement en morceaux à la moindre
manipulation....






La seconde torpille , bien que ne présentant aucune lésion visible , ne se laissait
déplacer qu'avec beaucoup d'insistance.
Bref, les torpilles Minitrix , en plus d'être fragiles , roulent (très) mal !

Et je ne suis pas le seul : mon ami Didier rencontre la même mésaventure avec ses propres
exemplaires....

Dans un premier temps , je me suis donc mis à la recherche de pièces de rechange ...
...et c'est ainsi que je suis tombé par hasard sur deux vidéos postées par des amateurs
allemands .
On y évoquait l'amélioration notable des qualités de roulement des torpilles  Minitrix
suite au montage de "Kugellager" , un système de paliers avec roulements à billes !!!

Voici une de ces vidéos:

Torpedopfannenwagen leichtläufig - YouTube



Enthousiasmés à la lecture de  cette vidéo , Didier et moi avons décidé de passer à
l' acte et de modifier nos wagons de la même façon..
Apparemment , il n'existe pas sur le net de tutoriel consacré à cette transformation.
Du moins je n'en ai pas trouvé.
Voici donc ici le résultat de mes essais , cogitations , erreurs , etc.... .



Les supports d'essieux.

La trouvaille est géniale : on équipe le premier et le dernier essieu de chaque bogie
de roulements à bille ; ce seront eux qui supporteront l' entièreté  du poids de la
torpille et qui lui donneront de bien meilleures qualités de roulement.

Cette petite prouesse d'ingénierie  doit apparemment  être mise au crédit d'un certain
Tregger ; c'est du moins le nom (ou surnom) qu'il se donne sur Shapeways.
C'est en effet sur ce site que les nouveaux supports d'essieux sont disponibles ; il
faut rechercher : Treggers MoBa Gedoens by Tregger - Shapeways Shops.







Prudence au moment d'effectuer sa commande : il existe aussi, auprès du même
fournisseur , des supports d'essieux destinés à simplement remplacer les anciens ,
sans offrir la possibilité d'y insérer les fameux roulements à billes.
Il faut donc opter pour les "Torpedo-kugel", pourvus des logements nécessaires.

Ces éléments , obtenus par impression 3D , se vendent sous la forme de kit simple ,
double , triple et même quadruple , avec , bien sûr , un prix dégressif.

Pour faire son choix sur le site de Shapeways , on peut consulter des images qui ne
représentent cependant pas les réalisations définitives.
Ce ne sont que des projections numériques.




Torpedo-kugel x 1.  (18,71 $).


Torpedo-kugel x 2.  (34,95 $).


Torpedo-kugel x 3.  (51,19 $).


Item 4181684 . Torpedo-kugel x 4.  (67,44 $). (47,12 €).



Didier et moi-même avions besoin chacun de deux kits ; nous avons donc fait
un achat groupé et choisi le kit "torpedo-kugel x 4 " dont le prix est plus avantageux.

Dans le budget , ne pas oublier la T.V.A. ( 21 %) et les frais de port (6,34 €).
A titre indicatif , le total s'est chiffré à 64,71 €.

J'ai passé  commande un samedi après-midi et la livraison s'est faite le mercredi
suivant : efficace !
Emballage soigné pour des pièces confectionnées dans une belle matière translucide
et semi-rigide : on parle ici de  FUD (Frozen Ultra Detail)...


Les supports d'essieux de Treggers MoBa Gedoens by Tregger- Shapeways Shop.


Les roulements à billes.

Il faut 16 roulements à billes pour équiper un wagon-torpille.

Les amateurs allemands ont commandé les leurs auprès du vendeur suivant :
GHW-Modellbauversand dont voici l'adresse:

www.modellbauershop.de


            - Objet de la commande : Roulements à billes (rillenkugellager).
            - diamètre intérieur (innendurchmesser) : 1,5 mm.
            - diamètre extérieur (aussendurchmesser) : 4,0 mm.
            - largeur (breite) : 2,0 mm.
            - référence 681XZZ.
            - numéro de commande 681500.
            - prix : 8,90 € pour 10 pièces.


Mais Didier  les a aussi trouvés en Chine...


https://fr.aliexpress.com/item/681XZZ-100-PCS-L-415ZZ-W68-1-5ZZ-1-5MM-4MM-2MM-Miniature-Ball-Bearings/1424176255.html?ws_ab_test=searchweb0_0,searchweb201602_4_10152_10065_10151_10068_5430020_5410020_10304_10307_10137_10060_10302_10155_10154_10333_10334_10056_5370011_10335_10055_10336_10054_10059_10332_100031_10099_5400020_10103_10102_10052_10053_10107_10050_10142_10051_5380020_10326_10084_10083_10080_10082_10081_10177_10110_10111_10112_5390011_10113_10114_10312_10313_10314_10078_10079_10073_5420011-10333,searchweb201603_18,ppcSwitch_2&btsid=557b12bb-cacc-48c6-974b-caa1b3287074&algo_expid=2f446e2d-eb0b-4bb3-b873-d9d7c727b4ef-22&algo_pvid=2f446e2d-eb0b-4bb3-b873-d9d7c727b4ef&transAbTest=ae803_1



... et c'est là que nous les avons commandés . Délai : 2 à 3 semaines.



Les roulements et les supports d'essieux.




Démontage de la torpille.

On démonte d'abord la torpille en ses différents sous-ensembles .
Trois petites vis  à desserrer de chaque côté de la cuve , et c'est fait.

Attention , ces trois vis présentent chacune  une longueur différente ; il s'agit donc de
bien noter à quel endroit il faudra les replacer ! (Ce que j'ai omis de faire , je dois bien
l'avouer....).








Les bogies à 4 essieux.



Je propose de commencer par un des bogies à quatre essieux , histoire de se faire la
main.

En premier lieu , il faut retirer les anciens supports du corps du bogie.
Un tournevis plat convient parfaitement à cette tâche qui sera paradoxalement
facilitée par la fragilité de ces pièces : elles vont en effet se briser comme du verre !!
Sur les huit bogies que comptent mes deux torpilles ,  un unique support à survécu !





Le corps de bogie et son support d'essieux ,  seul et unique survivant.....



Seuls les deux essieux extérieurs vont être munis chacun de deux roulements à billes
et devront donc être démontés.
Au moyen d'un petit extracteur , on retire la roue pourvue d'une bague isolante en
matière plastique.
C'est beaucoup plus facile , car , de l'autre côté , c'est calé à mort !!!!










Je possède ces torpilles depuis de nombreuses années , et je pense les avoir achetées toutes
deux dans un intervalle de temps assez court.
Et pourtant...des différences vont apparaître...








Au cours de la transformation du premier wagon , j'ai constaté que , sur la majorité des
axes d'essieux, le roulement s'enfilait à la main, sans difficulté et sans recours à une presse...
De plus , il coulissait librement sur presque  toute la longueur de l'axe , se bloquant cependant
à l'approche de la roue sans bague isolante.
L'axe a dû subir une légère déformation lorsqu'on l'a fait entrer de force dans la roue non
isolée et son diamètre s'en est vraisemblablement trouvé quelque peu modifié.

Pour remédier à cette situation , j'ai imaginé la solution suivante : serrer l'extrémité libre
de l'axe dans le mandrin d'une Dremel (ou autre) et le faire tourner tout en appliquant une
lime bien à plat durant quelques instants .







Et terminer par un polissage au papier de verre à grain fin (800 - 1200).


Une languette de papier de verre et on fait tourner l'axe...


Vérifier ensuite si le roulement ne se coince plus et , le cas échéant , recommencer cette
opération.

Lors de la transformation de la seconde torpille , ce fut la (désagréable) surprise : impossible d'engager un seul roulement sur les axes d' essieux !!!

Et c'est ici qu'à défaut de presse , je me suis servi d' un petit étau à mors bien parallèles
pour engager le roulement sur l'axe d'essieu.








Et pour le pousser plus loin sur l'axe , je répète l'opération en intercalant entre le mors
de l'étau et le roulement un petit segment de tube fait d'un métal "tendre", ici , de l'aluminium.
Le diamètre extérieur du tube doit bien sûr être approprié : égal ou légèrement inférieur
à 4 mm.
Et le diamètre intérieur , bien sûr , doit excéder 1,5 mm pour que le tube puisse  coulisser
sur l'axe.



Un petit bout de tube pour pousser le roulement sur l'axe.


Mise en place du second roulement.


Me voici donc en possession de deux torpilles différentes : les essieux de la première se
meuvent librement dans leurs roulements , ce qui n'est pas le cas sur la seconde.
Tout cela n'a pas vraiment d'importance : les essieux garnis de roulements sont les essieux
extrêmes de chaque bogie ; le fait qu'ils aient peu de jeu latéral n'est pas bien grave..


Une fois la pose des deux roulements effectuée , on peut remonter la roue sur l'axe en
vérifiant le bon écartement au pieds à coulisse ou au moyen d'un gabarit approprié.



Vérification du bon écartement des roues.


Les supports d'essieux Shapeways possèdent à chacune de leur extrémité une alvéole
de forme cylindrique dont la fonction est d'accueillir une paire de  roulements à billes.
Ce dispositif vient remplacer les berceaux qui maintenaient le premier et le quatrième
essieu.
La nouvelle pièce ne pourra cependant être mise en place sans une modification du
bogie.
En effet , pour libérer l'espace nécessaire aux nouveaux  supports , il faut impérativement
faire  disparaître à chaque extrémité de la caisse des bogies deux petits ergots sur lesquels
prenaient appui et tournaient  les axes du premier et du quatrième essieu..
On peut remarquer en examinant la photo suivante que les ergots extérieurs sont plus longs
que les ergots intérieurs. Ils portent de plus des marques d'usure dues à la rotation des axes
d'essieux.
On peut donc en conclure que , dans le système Minitrix d'origine , c'étaient aussi les essieux
extrêmes qui supportaient le poids du wagon.... mais avec peu d'efficacité !!!




Les quatre ergots à faire disparaître.


Je les entame à la  pince coupante pour plastique (ici , une pince Tamiya) et je termine
au ciseau X-Acto bien affûté ,  ou encore à la fraise..




"La" pince Tamiya.



Les corps de bogies prêts à recevoir les roues et leur support.
































Les pièces Shapeways sont remarquablement bien ajustées et étonnement solides...
Sur la photo ci-dessous , je me sers de la queue d'une petite lime pour pousser une
des pattes du support vers le bas et la faire s'encliqueter dans son logement.










On peut maintenant insérer les roulements dans leur logement ; cela se fait sans effort
particulier.
Malgré cela , le maintien semble suffisant.
Je n'ai pas encore pensé à recourir à un collage qui devrait se faire de la façon la plus
prudente pour éviter de bloquer les roulements.
Je verrai avec le temps si c'est nécessaire.


































Les bogies à cinq essieux .


Même processus.

Il faut bien sûr supprimer les petits ergots aux deux extrémités.






Flèches rouges : les quatre ergots à faire disparaître.
On peut se contenter de réduire ceux de droite au niveau de la pièce allongée située à leur gauche.
Flèche verte : la petite tige sur laquelle s'enfile la boucle du ressort de rappel de l'attelage.
A conserver absolument !!!




Le support pour bogie à cinq essieux se prolonge , côté attelage , par une excroissance
de forme semi-circulaire.
Elle participe au maintien du dispositif d'élongation et est sensée guider les déplacements
latéraux du timon d'attelage.









Il faut absolument réduire la longueur de ce prolongement de quelques fractions de
millimètre , à la lime , ou à la meule.
Sans quoi , une fois le support mis en place , l'attelage se retrouvera complètement
bloqué dans ses mouvements...(je parle d'expérience ...).









Le remontage de l'attelage doit bien sûr se faire avant de "clipser" définitivement le
support dans le corps du bogie et on n'oubliera pas d' accrocher la boucle du ressort
de rappel du timon d'attelage à la petite tige prévue à cet effet. (Voir la "flèche verte"
sur une image précédente).







Voilà !
On peut maintenant ré-assembler notre wagon-torpille et le remettre sur la bonne voie.....
Et maintenant , çà roule sans problème  !!!







Une petite vidéo ?








Un peu d'histoire....
Certains vont vraisemblablement se poser la question de savoir si des convois de
fonte ont effectivement traversé un jour la gare de Lamorteau.
En 1964 , des essais de transfert de fonte en fusion entre usines sidérurgiques et sur
de longues distances ont été tentés.




Extrait de la revue "Le Rail".




Le dimanche 20 décembre 1964,  un transport de  fonte à 1385 °C , au départ des
hauts-fourneaux d'Hagondange (au sud de Thionville) , a  transité par Longuyon,
Montmédy , Ecouviez , Lamorteau , Virton (avec remise en tête) et enfin , Namur ,
avant d'être dirigé sur Chertal. La température de la fonte à l'arrivée était encore de
1290 °C après un trajet de 280 kilomètres.





mardi 13 juin 2017

Puits n° 18. Moins 1291 mètres.








1991.

Que d'années écoulées , déjà , depuis qu'est survenu l' impensable : la disparition de ce
joyau de notre patrimoine industriel , le puits 18 ou "Fosse Parent" , du nom de l'ancien
propriétaire du lieu.
Ce charbonnage  était aussi appelé "Puits Providence" , de par son voisinage avec les
installations de l'entreprise éponyme.




Charleroi-Dampremy. Les hauts-fourneaux de La Providence. 1980. © Photo Jacques Quoitin.



Une petite devinette.....pour prendre un ton plus léger....
Où se trouve le Puits 18 sur l'image ci-dessus , prise depuis le terril de la Blanchisserie en 1980 ?

Réponse en fin d'article....




Marchienne. Puits 18. © Photo Jacques Quoitin.



Quel ensemble !!!!
Pensez donc : trois puits de mine avec leurs chevalements , salles des machines , recette et
bureaux, entassés sur une surface n'excédant pas quelques centaines de mètre carrés...




Marchienne. 1982. Fosse Parent.


Cet ensemble constituait un  des lieux d'extraction de la société Monceau-Fontaine  qui disposait ,
au sommet de sa gloire ,  d'un effectif de plus de 10.000 mineurs....

Les deux premiers puits furent foncés en 1844 , le troisième en 1930. Les veines de charbon les
plus profondes étaient exploitées entre 1220 et 1291 mètres de profondeur.

Le 15 avril 1940 , un coup de grisou entraîna malheureusement la mort de 26 mineurs.

Episode du déclin de l'activité charbonnière en Wallonie , la fermeture définitive du siège eut
lieu le 31 mars 1978.




Puits 18. Châssis à molettes. © Photo Jacques Quoitin.



C'est par hasard , au début des années 80 , que j'ai rencontré pour la première fois cet
extraordinaire témoin du  passé minier de Charleroi .
Quelle magnifique surprise de le voir apparaître au fond d'une de ces rues étroites se faufilant
parmi les usines : la rue de la Docherie , le long de la cokerie , dans laquelle s'embranchait
la rue des Réunis , aujourd'hui disparue.








A cette époque , mon intérêt  pour le chemin de fer et la sidérurgie m' avait entraîné dans les
dédales de la "Providence" à la recherche d'anciens  wagons destinés au transport du minerai ,
du charbon et du coke et , bien sûr , de la fonte.
De  vastes halls jouxtant le "train 600"  servaient à ce moment d'abri pour  ces véhicules en
attente de démolition. Et les quelques voies ferrées encore présentes sur la  cour du charbonnage
en étaient aussi encombrées.




Marchienne. Fosse Parent. Wagons en attente de ferraillage. © Photo Jacques Quoitin.



Marchienne. Fosse Parent. Poche à fonte. © Photo Jacques Quoitin.




Marchienne. Fosse Parent. © Photo Jacques Quoitin.


Le silence des lieux troublé seulement par les rumeurs de l'usine voisine ou les évolutions
sporadiques d'une locomotive sur les voies toutes proches , les molettes à jamais immobiles
au sommet de leur tour , les câbles inertes ,  le carreau désert , les sirènes muettes....

Le Puits 18 , pour un photographe , c'était le Graal.
Pour les cinéastes aussi , d'ailleurs....

En 1982 , Pierre Granier-Deferre  porta ainsi son choix sur ce site pour tourner des scènes
du film "l'Etoile du nord".
Et en 1989 , ce fut au tour d'Eric Barbier de mettre en scène le charbonnage dans son film
"Le brasier" , qui , s'il fut cette année-là le film français au plus gros budget , ne rencontra
hélas que peu de succès.





Marchienne. 1982. Fosse Parent. © Photo Jacques Quoitin.



Marchienne. 1982. Fosse Parent. © Photo Jacques Quoitin.



C'est par la presse qu'en 1991 , je pris connaissance de la démolition du siège "Parent".

Depuis , il m'arrive  encore souvent d'y penser et de regretter de n'avoir pas pris plus
de photos.....


Je suis parfaitement conscient du fait qu'il faut faire des choix en ce qui concerne la
conservation du patrimoine , mais je suis encore plus parfaitement conscient du fait
que la décision qui fut prise  dans ce cas-ci n'a été qu' une occasion manquée.....





Marchienne. Fosse Parent. © Photo Jacques Quoitin.



Réponse à la devinette:
On peut apercevoir le sommet des  chevalements de la Fosse Parent à la gauche du château
d'eau situé à droite sur la photo.






dimanche 26 février 2017

...à Völklingen, à Völklingen...





En mettant un peu d'ordre dans ma collection de diapositives,  j'ai retrouvé ces quelques images
prises au cours d'une belle journée de septembre 2000  passée à Völklingen , en Sarre , à deux pas
de Sarrebrück.



Photo Géoportal-Deutschland.



Völklingen Hütte , c'est le nom de ce site établi au creux d'un méandre de la Sarre , est une
ancienne usine sidérurgique mise à l'arrêt en 1986.

En 1994 elle fut désignée "Patrimoine culturel mondial" par l'Unesco en raison du fait qu'elle
se présentait au visiteur dans un état proche de celui qu'elle offrait à ses débuts.
Le site fut ouvert  au public en  l'an 2000.
Et c'est en septembre de la même année que j'ai eu l'opportunité d' y faire un petit tour .
En visitant depuis le site internet dédié à l'ancienne usine , j'ai pu constater qu'en
dix-sept ans  "Völklinger Hütte" a approfondi son rôle de musée industriel tout en développant
l'accueil de nombreuses manifestations culturelles : expositions photographiques , concerts, etc...
Le parcours du visiteur , relativement limité en l'an 2000 , s'est lui-aussi considérablement
étendu.
Le but de ce petit article est simplement de donner à d'autres amoureux (ou plutôt : nostalgiques...)
de la sidérurgie l'envie de se rendre , eux-aussi , sur place.....



Carte d'entrée au site de "Völklinger Hütte".










































Un peu d'histoire....


C'est en 1881 que Carl Röchling  acquiert  une usine désaffectée et fonde la "Völklinger
Eisenwerk Gebr. Röchling in Völklingen".

En 1903 , l 'entreprise aligne déjà sa batterie  de six hauts-fourneaux et emploie 3000 personnes.
Au milieu du 20ème siècle , ce chiffre montera à 17000 .

Le charbon nécessaire est de provenance locale , tandis que le minerai de fer est extrait
dans le bassin de Briey voisin (en Lorraine , à cette époque sous administration allemande)
ou au Grand-Duché.

Völklinger Hutte sera durant toute son existence à la pointe du progrès : procédé Thomas ,
moteurs soufflants à gaz de gueulard , épuration à sec des gaz de H.F.  , etc....

Cependant ,  cette aventure ne sera pas qu'un long fleuve tranquille....

En 14-18...
La fin du premier conflit mondial verra les Röchling condamnés pour la destruction et le
pillage d' usines sidérurgiques en terre belge et française...
Les troupes allemandes dynamitaient les hauts-fourneaux dans les zones occupées et
dépouillaient systématiquement certaines usines d' une partie de leurs équipements.
Ces derniers étaient ramenés au pays pour être réutilisés tels quels ou pour servir de
matière première dans une Allemagne sous embargo.
Il s'agissait bien sûr aussi d' éliminer de  futurs concurrents , une fois la paix revenue.
C'est ainsi , par exemple , que l'usine "La Providence" de Réhon- Longwy se vit privée
d' une partie de ses ponts roulants au bénéfice de l'usine de Völklingen...

En 40-45...
Durant la seconde guerre mondiale Hermann Röchling devint un des conseillers d'Albert
Speer , ministre de l'équipement du Reich.
Il fut condamné en 1948 à une peine de prison  pour avoir fait travailler, au sein de ses
usines et  dans des conditions  extrêmement  pénibles , des prisonniers de guerre et autres
travailleurs  provenant des régions passées sous domination nazie.

L'usine de Völklingen se verra placée sous administration française entre 1945 et 1957 ,
année de retour de la Sarre à L'Allemagne.

Et ce n'est qu'en 1967 que la dynastie des  Röchling à la tête de l'entreprise s'éteindra avec
le départ à la retraite d'Ernest , le neveu d'Hermann....






La visite...


Völklinger Hütte. Hauts-fourneaux , cheminées , Cowpers ....
© Photo Jacques Quoitin.






























Les hauts-fourneaux.


Les premiers éléments qui focalisent le regard du visiteurs sont bien sûr les hauts-fourneaux
hérissés des énormes tuyauteries servant à la prise de gaz au gueulard.
Ils sont escortés de leurs Cowpers , ces gigantesques appareils coiffés d'une demi-sphère
destinés à préchauffer le vent insufflé à la base des fourneaux.
Le tout est surmonté de hautes cheminées dont le rôle est précisément d'évacuer les gaz
brûlés au cœur des Cowpers.
Voilà  le décor planté.






Völklinger Hütte. Cowpers et cheminées.
© Photo Jacques Quoitin.


Völklinger Hütte. Prise de gaz de gueulard.
© Photo Jacques Quoitin.


Völklinger Hütte. Au pied du fourneau.
© Photo Jacques Quoitin.


Le travail dans l'environnement des hauts-fourneaux n'était pas sans risques , comme en
témoigne cette stèle métallique dressée à la mémoire des treize travailleurs ayant perdu la vie
à la suite d' une explosion ,  le 16 janvier 1928.










L'Elektro-hängebahn.

Le système d'alimentation  des H.F. est d'une conception des plus originales.
Alors qu'autre part on amène minerai et coke au gueulard à l'aide de bennes ou de skips ,
l'usine de Völklingen a mis en service son "Elektro-hängebahn".
Il s'agit d'une sorte de "chemin de fer suspendu" sous lequel 310 "wagons", des sortes de
bennes , plutôt , se déplacent le long de 6 kilomètres de "voies" depuis les bunkers de
minerai et  de coke pour alimenter les gueulards des 6 hauts-fourneaux , tous établis sur
le même niveau.




Völklinger Hütte. Cowpers , Elektro-Hängebahn
(Système d'alimentation en minerai et coke , à gauche de l'image)
et bunker pour minerai (en-dessous , à droite ).
© Photo Jacques Quoitin.



La halle des "soufflantes".

Le centre vital de l'entreprise , son cœur et ses poumons , devrait-on dire , est abrité dans
la halle des "soufflantes" .
C'est entre 1905 et  1914 que cette vaste salle a été pourvue de ces dix belles machines
aux dimensions impressionnantes.
Six d'entre elles ont  été conservées pour le plus grand plaisir du visiteur ....et du photographe.
Ces engins , entraînés par des moteurs alimentés au gaz de haut-fourneau , vont générer
le "vent" destiné , après préchauffage dans les Cowpers , à être injecté par un système de
tuyères à la base des hauts-fourneaux. C'est lui qui va activer la combustion et permettre
l'obtention des hautes températures indispensables au processus de réduction du minerai
de fer..
La production horaire des deux "soufflantes" les plus puissantes de l'usine était de 62.000
mètres-cubes.
Il faut savoir que , par heure de fonctionnement , chaque haut-fourneau demande  70.000
mètres-cubes de vent ....



Völklinger Hütte. Moteur à gaz de haut-fourneau. © Photo Jacques Quoitin.



Völklinger Hütte. Moteur à gaz de haut-fourneau. Distribution par soupapes.
© Photo Jacques Quoitin.


Völklinger Hütte. © Photo Jacques Quoitin.


Völklinger Hütte. Machine soufflante. © Photo Jacques Quoitin.



Völklinger Hütte. Tableau de transmission d'ordres.
© Photo Jacques Quoitin.



Les commandes de vent se faisaient  à distance depuis les postes de contrôle des hauts-fourneaux
grâce à un système de transmission d'ordres par panneaux lumineux , un peu à la façon des
"Chadburns" en usage dans la marine. Les mécaniciens pouvaient ainsi adapter la marche des
machines aux besoins du moment.




Völklinger Hütte. La cokerie. © Photo Jacques Quoitin.
La cokerie.







































Völklinger Hütte disposait de sa propre cokerie . La production journalière de 1800 tonnes
de coke était cependant bien insuffisante pour alimenter une batterie de six hauts-fourneaux.
La capacité du silo à charbon qui la surmontait était de 1000 tonnes.




Völklinger Hütte. Fours à coke. © Photo Jacques Quoitin.



Dans les cokeries modernes , le coke incandescent est défourné dans un "coke-car", véhicule
spécial se déplaçant sur des rails et que l'on amène sous une tour d'extinction.
Ici, à la fin du processus de  cokéfaction  , le coke incandescent était poussé sur un plancher
constitué  d'épaisses dalles métalliques et ensuite éteint à la lance d'incendie.



Un peu de chemin de fer...(quand même..).




Völklinger Hütte. Locotracteur Henschel. © Photo Jacques Quoitin.



Sur une des voies de l'usine , un locotracteur Henschel est immobilisé à la tête d'une courte
rame de trémies.










En 2001 , "Völklinger Hûtte" a édité cette plaquette en langue allemande . Les différents secteurs
de l'usine y sont passés en revue avec leur histoire , leurs fonctions et leurs aspects techniques .
L'ouvrage est copieusement illustré par le photographe F. Mörscher.


En terminant la rédaction de cet article , je me sens pris par une envie soudaine de redécouvrir
Völklinger Hütte"  17 ans après  ...
Allons ! Promis , juré , ce sera pour les premiers beaux jours de ce  printemps déjà tout proche !